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Témoignage 02/06/2016

Séverine Jean, carreleuse

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Séverine Jean

  - 30 ans

Carreleuse

Je me sens immensément heureuse dans mon métier.

En bref

Séverine Jean voulait intégrer un monde professionnel fait de force, d’endurance, et de couleurs : depuis 2008, elle est carreleuse. Lauréate 2011 du concours du meilleur ouvrier de France, elle planche aujourd’hui sur un ouvrage destiné à lui faire remporter le record du monde de la plus grande rosace.

 

Séverine Jean est entrée à l’Afpa en 2007, au centre de Valence, pour devenir carreleuse. Il s’agissait pour elle d’une reconversion professionnelle : elle avait travaillé pendant dix ans dans l’entreprise familiale, une casse de voiture, comme démonteuse. Son désir de devenir carreleuse lui est venu à l’âge de 30 ans, le jour où par hasard elle a vu travailler un artisan carreleur chez ses parents.

Séverine Jean a dû alterner sa formation et son travail en entreprise, pendant sept mois. « C’était déjà éprouvant, car j’étais la seule des stagiaires à avoir ce rythme-là. Heureusement, j’ai eu la chance d’avoir un formateur sensationnel, qui m’a beaucoup soutenue. Je devais avancer deux fois plus vite que les autres pour compenser mes absences », précise-t-elle. Les difficultés ne sont pas du genre à effrayer la carreleuse : ce genre de défis l’attirent au contraire.

 

Carreleuse, un métier d’endurance

Aujourd’hui, lorsqu’on lui demande quelles sont les contraintes du métier de carreleuse, Séverine Jean  a du mal à répondre. Au départ, elle pensait que l’endurance physique en serait une ; elle s’était donné deux ans pour voir si elle arrivait à tenir le coup. « Non seulement je tiens le coup, mais  je fais ce que j’adore faire ! Ce n’est même plus une contrainte, c’est un plaisir. » Pour tenir la forme, la carreleuse court trois fois par semaine, dès le matin à 5 heures ; et tous les soirs, elle travaille son endurance avec un coach sportif.

Être une femme, au départ, a certes rendu son insertion professionnelle un peu difficile : Séverine Jean a dû rencontrer plusieurs employeurs avant d’être embauchée. On lui demandait de faire ses preuves, plus qu’à d’autres. Mais elle s’est battue contre cette méfiance ; aujourd’hui, elle a prouvé que carreleuses et carreleurs travaillaient sur le même pied. Être une femme dans ce métier n’occasionne plus pour elle que de l’amusement : « j’adore voir la réaction des gens, qui s’attendent à voir arriver un "carreleur", et qui me découvrent. », dit-elle. « Après, ça ne change rien au travail que je fais et ils le savent, c’est juste un petit choc "Ah oui, c’est vrai qu’on a beau dire carreleur, il peut être une femme" – ça m’amuse. »

Les qualités qu’elle trouve à son métier sont finalement sans nombre : Séverine Jean aime la diversité des ouvrages à réaliser (sur sol, mur, chape, etc.), la mobilité, le travail en couleurs, le rythme de travail effréné, le challenge artistique, l’endurance physique… A l’heure actuelle, elle travaille en SARL. « Je dois gérer en même temps entreprise, comptabilité, clients à voir pour les devis, ouvrages, aller chercher les matériaux dont j’ai besoin… et je suis seule pour tout faire. Mais là aussi, c’est un plaisir, la cadence me plaît ! »

 

Des ambitions toujours plus grandes

Dès ses premiers jours en tant que carreleuse, Séverine Jean s’est renseignée autant qu’elle l’a pu sur les possibilités de son métier : compétences à acquérir, contacts à prendre, concours divers auxquels candidater… Deux ans et demi après sa titularisation, elle s’est lancée dans le concours du meilleur ouvrier de France, qu’elle a brillamment emporté en 2011.

Lauréate du prix du meilleur ouvrier de France 2011, grâce à cette rosace

Lauréate du prix du meilleur ouvrier de France 2011, grâce à cette rosace

 

Aujourd’hui, Séverine Jean travaille à un autre projet de rosace, qu’elle réalise sur la façade de sa maison de Saint-Marcel-lès-Valence : celui-ci doit lui permettre d’emporter le record du monde de la plus grande rosace en carreaux de grès cérame – un des matériaux les plus durs – de 30 cm par 30 cm.

Plus tard, Séverine Jean envisage de devenir formatrice pour l’Afpa. Elle a déjà initié au métier, de son côté, trois jeunes femmes qui l’avaient sollicitée. Cette expérience l’a confirmée dans son aspiration à former des adultes : « je veux aider des hommes et des femmes à se battre pour faire un métier qu’ils ont choisi et qui leur plaît. » explique-t-elle.

« Je pars d’un constat simple : je me sens immensément heureuse dans mon métier. Or, autour de moi, je vois beaucoup de gens qui se sentent mal dans leur travail, qui sont vraiment malheureux à cause de ça ; et ce n’est pas peu de chose être malheureux au travail, ça peut détruire une vie. S’il y a un message que je veux faire passer, c’est celui-là : faites le métier qui vous plaît. Il vaut mieux changer de métier que persévérer dans un métier qui vous rend malheureux. Sans préjugés, sans peur, faites le métier qui vous plaît, battez-vous pour. C’est pour ça que j’envisage de devenir formatrice : s’il y a des gens prêts à intégrer un métier aussi beau que le mien, je veux les accompagner. »

 

 

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