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Témoignage 06/03/2017

Marjory Benoot : carreleur, un métier d'homme, vraiment ?

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Marjory Benoot

  - 30 ans

carreleuse

« Ce qui compte, c’est le premier jour : ou ça passe, ou ça casse. »

En bref

Marjory Benoot se découvre une passion sur le tard pour le carrelage. Aussitôt cette maman solo décide de se reconvertir. Parcours.

Quand Marjory Benoot, la trentaine, parle de son métier on sent la détermination pointer derrière le sourire. Opiniâtre, elle l’est et c’est bien sa ténacité qui lui a permis de devenir carreleuse, un métier où les femmes représentent seulement 1,4 % des effectifs.

Marjory a d’abord exercé différents métiers dans le commerce et la restauration : vendeuse, barmaid en discothèque… Elle arrive au carrelage par hasard alors qu’elle construit avec son (ex)mari leur maison. Elle se charge des travaux de finition et se découvre une passion et une vocation : elle sera carreleuse. « C’est le côté artistique qui m’a plu, le travail manuel, faire de belles choses qui se voient ».
 

«Dans le bâtiment, quand on fait ses preuves, homme ou femme, on est accepté »

Une reconversion facile ? Pas tant que cela. Il lui a fallu d’abord convaincre Pôle emploi qui préférait orienter cette maman -désormais solo- de deux filles vers des métiers de service et de bureau, dans la continuité de son parcours professionnel. Obstinée, elle ne lâche rien et, finalement Pôle emploi subordonne son accord à une Evaluation en Milieu de Travail (EMT).

Pas de problème, Marjory contacte une quinzaine d’entreprises. Un seul chef d’entreprise lui répond, Florian Gilardeau, jeune patron de Paralax à St Yriex. Une rencontre décisive qui confirme sans équivoque son choix professionnel : « Il m’a fait confiance immédiatement. Sans lui, je n’aurais pas pu entrer en formation, ni devenir carreleuse ». L’immersion est tellement réussie que Marjory y effectuera par la suite son stage en entreprise.

Marjory Benoot entre à l’Afpa de Mornac sur les conseils de Pôle emploi : « J’étais la seule femme au milieu d’une quinzaine de stagiaires. L’ambiance, c’est très « Bâtiment », quand on fait ses preuves, homme ou femme, on est accepté, j’ai tout de suite été à l’aise. Une formation « top » qui cadrait avec mes attentes, je n’ai eu aucun souci… » L‘enseignant,  Bernard Maurin, pro et attentif, maintient qualité de travail et ambiance d’atelier. Il confirme que très peu de femmes se forment à ce métier réputé très « physique, donc masculin » et que les rares carreleuses exercent surtout en famille.
 

Sérieux, précision, goût et motivation, les carreleuses sont un plus dans le métier

Marjory Benoot trouve immédiatement du travail, une fois son diplôme obtenu, il y a moins de deux  ans. Elle travaille en intérim et refuse même des missions pour « garder un équilibre familial et personnel » …

Des difficultés avec les employeurs ou les clients ? « Les entreprises nous apprécient parce que nous sommes méticuleuses, précises et motivées ». C’est sur le terrain que le carreleur fait ses preuves. Ce qui compte, « c’est le premier jour : ou ça passe, ou ça casse. » Sur la totalité des chantiers réalisés, Marjory n’a rencontré qu’une seule fois de la réticence parce qu’elle était une femme. Sa plus grande fierté, « Avoir été rappelée par un chef d’entreprise qui, méfiant, l’avait recrutée initialement pour démarrer le chantier et qui lui a demandé ensuite de le réaliser entièrement ». Selon Marjory, c’est leur détermination, leur motivation et leur régularité qui sont les clés de la réussite des femmes dans ce métier.

Mais être carreleur n’empêche cependant pas de rester féminine : « Travailler en pantalon rose, pourquoi pas ? Je suis une femme -qui exerce le métier de carreleur- et je le reste en toute occasion ! »

 

« C’est le détail qui fait tout dans le carrelage»

« Je fais beaucoup de rénovation et je suis souvent seule ». Marjory Benoot travaille essentiellement pour Concept Bat, une entreprise locale de rénovation et de construction, basée à Soyaux : « Il faut être autonome et indépendant, s’adapter rapidement, cela me correspond tout-à-fait ». Elle a participé également à de grands chantiers comme celui de Castorama avec une soixantaine d’ouvriers. « L’intéressant dans ce cas, c’est de côtoyer tous les corps de métier. Le Bâtiment, cela fonctionne comme une famille ».

Le métier correspond à l’image qu’elle s’en faisait et à ce qu’elle a appris. La diversité des chantiers permet d’aborder de nouveaux matériaux et de mettre en œuvre de nouvelles idées, « On ne s’ennuie jamais ». D’après Marjory, c’est plutôt un avantage d’être une femme carreleuse : « Les clients me demandent souvent des conseils sur la décoration, les matériaux… Nous travaillons à embellir leur maison, c’est important ». Leur satisfaction est le véritable « plus » attendu. Autres sujets de contentement : le côté artistique très présent et l’ouvrage terminé qui se voit et reste durablement.

Selon elle, les femmes sont plus minutieuses et tenaces que les hommes, un véritable atout dans le carrelage qui est avant tout un travail de précision. Un métier qui reste très physique ? « Oui, les matériaux sont lourds, des sacs de 25 à 30 kg selon le produit mais, en général, on ne les porte qu’une fois, en début de chantier. On est souvent à genoux, dans la rénovation on travaille plutôt à l’intérieur, mais pas toujours à l’abri des intempéries ». Le métier est plus accessible aujourd’hui  avec les nouveaux conditionnements : « Il y a quelques années, les sacs pesaient le double ». Pour entretenir sa forme, Marjory fait régulièrement du sport.
 

Un parcours net et précis comme son métier

L’avenir, Marjory ne le voit pas autrement que dans ce métier, et ce ne sont pas ses filles, très fières de leur mère carreleuse, qui  viendront contrarier sa vocation, au contraire ! Elle vient de passer N3P2, moins de 2 ans après ses débuts. Cet échelon professionnel, véritable reconnaissance de son engagement et de sa qualité de travail, lui permet désormais d’être chef d’équipe et d’encadrer des ouvriers. Et lui garantit un salaire identique à celui des hommes, encadré par la Profession.

Ce parcours un peu hors du commun est une véritable invite pour les femmes  à se lancer dans un métier dit « masculin ». Entre évolution des technologies et abandon progressif des stéréotypes, le secteur du Bâtiment est de plus en plus prêt à les accueillir. Avec seulement 6% de femmes qui travaillent dans ce secteur,  il y a de la marge. Quant à Marjory Benoot, quels que soient ses projets, une chose est sure, elle ne restera pas sur le carreau !

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